Notre-Dame de Boulogne

Une légende rapporte qu’en 636, une barque poussée par des anges et auréolée de lumière, portant une statue de la Vierge Marie et de l’Enfant Jésus, accoste à Boulogne. La Vierge Marie demande aux habitants que l’on édifie une église en son nom. Boulogne devient un pèlerinage majeur dès le haut Moyen-Âge. Une cathédrale y est édifiée au XIe siècle.
La statue originelle est emportée au XVIe siècle par des soldats anglais, qui saccagent la cathédrale, restituée, mais à nouveau détruite, lors des guerres de religion puis des troubles de la Révolution française. Deux nouvelles statues sont réalisées au XIXe siècle, conformes à l’iconographie de la légende. Vénérée dans la cathédrale, la statue est portée en procession le deuxième dimanche après le 15 août (période du retour des Terre-Neuvas) ; cinq jours de fête lui sont consacrés. En 1938, Boulogne accueille le 4e congrès marial. Des reproductions moulées de la statue circulent dans le diocèse, puis dans toute la France, avant de revenir à Boulogne en 1948, dans le cadre de cérémonies grandioses.
La piété mariale reste vive dans les communautés locales, notamment parmi les pêcheurs, qui placent leurs bateaux et leurs entreprises sous l’égide de la Vierge nautonière.
Les géants et leurs porteurs

Enracinés dans la culture locale et régionale, les géants sont environ 500 dans les Hauts de France. Un inventaire précis demande une réactualisation permanente. Ils apparaissent dans les processions religieuses urbaines à la fin du Moyen-Âge, comme figures tutélaires de corporations. Aux personnages bibliques et hagiographiques, succèdent à l’époque contemporaine des figures historiques et légendaires locales. Associés à la vie de la communauté qu’ils représentent, ils animent les fêtes (ducasses, kermesses, carnavals) et vivent dans la rue.
Les premiers géants attestés dans la région étaient construits en osier, la tête en bois sculpté. Le plâtre, le carton, la résine polyester s’y sont ensuite substitués. La plupart des géants portés ont une structure en osier et bois, l’osier souple permettant de façonner la silhouette et n’écorchant pas le tissu dont est fait le vêtement.
Batisse et Zabelle

À Boulogne/mer, Batisse et Zabelle représentent la communauté des pêcheurs, très importante jusque dans les années 1950. La municipalité prend l’initiative de leur création en 1924, dans le cadre d’un cortège corporatif ; mis de côté dans les années 30, ils connaissent une première résurrection en 1956, une seconde en 1981 (après l’éclipse des années 70), une troisième en 2003, à l’initiative de l’association Mémoire boulonnaise. Outre leur sortie pour la fête de la Mer, Batisse et Zabelle participent au cortège de la Saint-Nicolas en décembre, à la cavalcade en août, accueillent les passagers au débarquement lorsqu’un paquebot fait escale dans le port, et sont associés aux grandes manifestations qui animent la région.
Ti Pierre

Les géants sont individualisés ; on leur prête non seulement un métier, mais un caractère propre et une vie de famille. Ti Pierre, fils de Batisse et Zabelle, a été baptisé lors de la tête de la Mer en juillet 2015.
Batisse porte la casquette de marine, la vareuse cachou et le pantalon de drap bleu, et porte son filet à l’épaule ; Zabelle est vêtue de la tenue d’apparat de la femme de pêcheur : corsage, jupe et tablier noirs, châle brodé, « dorlots » et coiffe soleil.
Les deux géants mesurent près de 4 m de haut et pèsent 60 kilos chacun. Un seul porteur est caché sous chaque structure. Ti Pierre a aussi été créé afin d’initier de jeunes porteurs qui pourront par la suite porter les grandes figures.
Le Reuze

Reuze signifie géant en flamand : c’est un nom générique. La légende veut que la côte dunkerquoise ait été attaquée par des géants à l’époque du roi Dagobert. Leur chef, Allowyn, laissé pour mort sur la place, aurait été converti par St Eloi et aurait ensuite protégé le côté des assauts de ses anciens compagnons d’armes. Il est vêtu comme un officier romain, et porte l’écharpe majorale.
La procession annuelle du Reuze est très ancienne, elle remonte au XVIe siècle. Mais il accompagne le carnaval surtout depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Au début du XXe siècle, Alfred Dumont, le maire de l’époque attaché aux traditions, fit construire une reuzinne, Mietje et célébra en grande pompe le mariage. Trois enfants, Pietje, Boutje et Miesje, composent la famille. Plusieurs gardes les accompagnent.
La Gourdasse de Malo les bains

La ville de Malo possède ses propres géants : Hilaire Patate et Violette la baigneuse, nés en 2008. Depuis 2018, ils sont accompagnés par la Gourdasse, faite de près de 5000 bouchons d’eau, de lait, de soda, recyclés. Le terme « gourdasse », nettement péjoratif, signifie une femme stupide, mais il se peut qu’il renvoie aussi à une citation du film populaire de Jean-Marie Poiré, Les Visiteurs (« Jacquot, passe-moi la gourdasse, j’ai grand soif »), confondant ainsi les deux sens du mot « gourde ». Comme plusieurs géants récents, la gourdasse associe un terme misogyne traditionnel, pris au second degré peut-être, mais renforcé par divers accessoires (la plaque automobile : « BLONDE QI 02 LOL », le panneau de stationnement « Emmerdeuse ») et des préoccupations écologiques actuelles.
Film arrivée des géants Batisse et Zabelle lors de la Fête de la Beurière 2022
Les géants dansent, parcourent et animent les rues de la cité. Ils sont associés à la vie de la communauté́ qu’ils représentent et symbolisent. Élément visible du patrimoine immatériel, le géant favorise le lien social et contribue à raviver la mémoire collective. Sa place est dans la rue et dans la fête.
Suivant les ressources humaines et matérielles, le géant est porté ou se déplace sur roulettes. Il peut mesurer de deux à plus de quatorze mètres de haut pour le géant de Nieuport, qui nécessite vingt-quatre porteurs. Les géants boulonnais, de taille modeste, ne nécessitent qu’un seul porteur par géant. L’Association « Mémoire Boulonnaise » assure l’animation des géants et recrute les porteurs, sur la seule base du bénévolat.